Inégalités et austérité freinent la consommation et donc la reprise

1er septembre 2015
Dominique Lemoine

Les inégalités économiques seraient à l’origine de la crise de 2008 et freineraient aujourd’hui la reprise de la croissance économique, selon le Prix Nobel d’économie Joseph Stiglitz, dont des propos sont rapportés par le quotidien français Le Monde.

Le Monde affirme que ce « pourfendeur des politiques d’austérité en Europe » travaille sur les causes des inégalités économiques aux États-Unis et sur leurs conséquences politiques et sociales, et qu’il publie cette semaine un nouvel ouvrage sur le sujet.

Dans le cadre d’une entrevue, Stiglitz aurait expliqué que les inégalités sont souvent le résultat de rentes et que l’ascenseur social serait bloqué pour les Américains des classes populaires qui disposent d’une mauvaise couverture de soins de santé, qui ont difficilement accès à l’éducation et qui trop souvent ne font plus partie des statistiques sur les demandeurs d’emplois.

Ainsi, les membres de ces classes populaires, parfois sans salaire minimum, auraient « peu de chances de voir leurs revenus augmenter », alors que justement la croissance reposerait sur une hausse de la consommation qui elle ne pourrait pas survenir sans hausses de revenus. Le même phénomène expliquerait aussi la stagnation de la demande sous l’effet des politiques d’austérité en Europe et ailleurs.

Par exemple, 44 % des répondants à une étude du Conference Board sur la confiance des Canadiens en leur économie estimeraient que le temps serait mal choisi pour faire un achat important, comme une maison ou une automobile, en hausse de 3 % par rapport aux données comparables recueillies au mois de juillet 2015, rapporte Le Devoir.

« Avant la crise des prêts hypothécaires à risque (ou subprimes en anglais), les dépenses des ménages américains étaient artificiellement et dramatiquement gonflées par le crédit. Maintenant que ce levier a disparu, nous constatons les ravages provoqués par les inégalités. Elles sont incompatibles avec une croissance saine (c'est-à-dire qui n'est pas alimentée par une baisse du dollar ou par une bulle boursière) », aurait ajouté Stiglitz.

Investissements publics clés = assurance de prospérité future

De plus, selon Stiglitz, profiter des taux d’intérêt réels actuels bas et négatifs en Europe et aux États-Unis pour investir maintenant en innovation, infrastructures et éducation permettrait aux États d’alimenter une solide croissance dans les années à venir, et ainsi de générer des recettes fiscales supplémentaires qui permettront l’équilibre des comptes publics.

« S’endetter pour construire l’avenir n’est pas un frein à la croissance. C’est de ne pas le faire qui est un cadeau empoisonné pour les générations futures », soutient Stiglitz.

Également, « ces dernières années, les profits ont augmenté de manière disproportionnée face aux salaires. Cette distorsion du partage des revenus est source d’inégalité et affaiblit la croissance potentielle. Une autre façon de la corriger serait de rendre notre fiscalité plus progressive et équitable. Il n’est pas normal qu’un spéculateur soit aujourd’hui moins imposé qu’un travailleur ».

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